C'est pas tant la baise qui la dérange, c'est
l'après.
Ce moment où la dissociation ne fonctionne plus, où Scarlett retrouve son corps au lieu de planer au-dessus comme une spectatrice passive qui regarderait le porno sordide tourné par une autre. Pendant, c'est devenu évident, mécanique. Il suffit de se court-circuiter la cervelle, de remplacer les neurones par la soif d'hémoglobine, de les imaginer écorchés, éviscérés, éventrés,
charcutés et de les ruiner jusqu'à ce que les faibles se carapatent avant de filer en mode automatique avec le reste. La lie. Les pires. Ce n'est pas difficile pour une femme aussi charnelle que Scar, que d'esquisser les mêmes gestes enivrants faussement spontanés, les mêmes gémissements feints, la même danse macabre revisitée avec ses variations,
oui, mais des variations connues par coeur, sur le bout des reins. Scarlett s'en fout. C'est jamais elle, qui se fait baiser lorsqu'elle ne l'a pas décidé, pas provoqué, c'est un espèce d'automate branché sur secteur pendant qu'elle disparaît en elle, ferme les yeux et se bouche les oreilles comme une môme, jusqu'à la fin. Le cul, ça va, elle maîtrise, c'est le reste qui lui coupe la respiration. Quand elle est sous la douche, quand elle entre à nouveau en elle, à reculons, Scarlett a toujours plus ou moins envie de gerber. De se vomir, partagée entre haine et dégoût, colère et folie vengeresse. Elle ressent souvent l'envie de se laver à la javel et de décaper sa peau pourtant douce à la laine de verre. Mais elle n'en fait rien, se contentant de se doucher rageusement jusqu'à rendre son épiderme brûlant écarlate. Et çal ne fonctionne que chez elle, dans le son taudis minable malgré le cumulus minuscule qui te finit à l'eau glacée et la salle de bains au plafond moisi. C'est ce rituel pour chasser le souvenir amer du gros porc qui vient de jouir en elle qu'elle achève lorsque les chacals se mettent à hurler à la lune.
D'humeur orageuse, Scar a encore l'impression désagréable de le sentir en elle, ce qui est complètement absurde au vue des sept minutes top chrono qui ont été les siennes. Regard noir et mâchoire serrée, la belle royale, glaciale, ignore royalement le grabuge qui résonne dans le hall décrépi : elle ne se fend d'aucun regard, d'aucun commentaire. Elle ignore les gros cons qui zonent constamment ici entre deux larcins dont elle n'a que faire pour rejoindre sa chambre et glisser un vinyle de Beethoven sur le tourne-disques qui trône à même le sol.
Voilà. La voix vrombissante se calme enfin ... jusqu'à ce que la fureur se rapproche et qu'elle entende ...
son nom ? Elle soupire, Scarlett, incapable de comprendre ce qu'elle a fait pour accueillir en son sein la lie de ce monde, elle qui vise pourtant le sommet. Difficile d'occulter le timbre rocailleux et atrocement irritant de Léon à la rage palpable pour une raison qu'elle ignore. Et dont elle se fiche bien. Elle pourrait essayer de
comprendre ce qui le conduit jusqu'à elle de la colère à revendre mais l'empathie n'est pas sa passion première et Scar l'égoïste ne se concentre que sur ses propres grimes, lorsqu'elle ne sombre pas dans ses épisodes d'indifférence destructrice. Son comportement de petite salope aurait presque pu l'amuser et peindre un sourire sur ses pulpeuses s'il ne résonnait pas douloureusement entre ses cuisses, ce soir. Docile ou plutôt ravie d'agacer le fauve, elle quitte le taudis glacial qu'elle occupe pour venir s'appuyer dans l'embrasure de la porte. A moitié nue, l'épiderme encore brûlant et pourpre d'une douche excessive. Stature altière d'impératrice castratrice et prunelles suintant déjà le sarcasme, Scarlett dévisage longuement Léon aux poings serrés, au couteau fébrile qui exulte comme un tigre. A la putain de bonne heure.
"Ecoute Léon, je ne sais pas ce que tu me veux et je n'en ai littéralement rien à faire." susurre Scar d'un timbre doucereux, presque érotique s'il n'était pas agrémenté d'un sourire de connasse, reptilien, dopé à la provocation. Le rival inopérant, elle le fixe allègrement comme s'il n'était qu'un vague étron sous ses pompes. Résolument pénible, mais particulièrement inoffensif.
"J'ignore ce qui vous prend à toi et tes petits copains dégénérés mais c'est pas le bureau des pleurs ici." Razvan, Haaken et maintenant Léon, autant d'abrutis lobotomisés aux poings fébriles et aux mots tranchants pour tenter de soumettre la petite conne indomptable.
Et Scarlett le plante là, pivotant sur ses jambes graciles dans un geste calculé, défiant, pour venir claquer la porte au nez de l'avorton. Pas ce soir Léon, pas ce soir. Mais en elle la tension se ravive déjà et ses muscles se bandent, prêts à mordre. Elle le connait l'animal impulsif, il n'a jamais accepté la négation comme réponse, c'est l'un de ses rares défauts qu'il lui arrive de respecter.[/color]
- Spoiler:
désolée, c'est vraiment de la merde mais j'ai toujours la tête vide